Les thermes sont-ils à l’eau ?
Au dernier conseil municipal du 2 octobre, le public est venu nombreux assister à la présentation de l’audit réalisé sur la situation financière de la ville et s’informer de l’état du dossier concernant les thermes. Le projet thermal mobilise toujours, les débats restent ouverts et quelquefois houleux.
» Bernard MAINGOT.
Le conseil municipal du jeudi 2 octobre a fait une fois encore le plein du salon d’honneur de l’Hôtel de ville. Les Angériens sont venus prendre connaissance d’une communication non annoncée à l’ordre du jour, concernant les premiers résultats de l’audit mené par KPMG sur la situation financière de la ville et présentée par l’adjoint au maire Gilles Raillard. Mais ils sont également venus écouter l’intervention du maire Paul-Henri Denieuil, qui, après avoir fait le point sur l’augmentation des incivilités, a rendu compte de l’état du dossier concernant le projet thermal.
Le conseil municipal, qui a commencé avec des propos courtois, s’est terminé en termes plutôt houleux sous une pression qui a monté durant deux heures, comme au temps des élections municipales de mars…
L’historique en détail
Paul-Henri Denieuil est intervenu en fin de séance pour communiquer l’état du dossier des thermes, dressant l’historique détaillé du projet rappelé ci-après.
Le conseil municipal du 23 novembre 1995 décide d’engager une série de démarches pour créer un établissement de cures thermales, en utilisant l’eau d’une nappe phréatique recelant des vertus thérapeutiques. Le forage, effectué en Février 1997, trouve l’eau d’un puits artésien à 853 mètres et les différentes autorisations administratives sont délivrées par le préfet entre novembre 1997 et mars 1999.
Un module expérimental est aménagé et, le 30 septembre 2000, la commune signe un accord avec la "Chaîne Thermale du Soleil" pour réaliser une station thermale et des résidences de tourisme en crédit-bail, accord assorti d’une promesse de vente du forage. Objectif : 5 000 à 6 000 curistes par an. L’Académie de Médecine donne un avis favorable le 3 juillet 2003 pour « une utilisation de l’eau du captage "Les Capucins" à des fins thérapeutiques dans un établissement thermal pour les orientations RH (rhumatologie) et PHL (phlébologie) », l’arrêté d’autorisation d’exploitation à l’émergence et après transport étant publié le 30 octobre 2003.
Le projet prend l’eau
Mais le projet capote le 22 octobre 2003, suite au décès du dirigeant M Barthélémy. Sa fille considère que « le projet est trop ambitieux et la rentabilité aléatoire ». La Ville reçoit un dédommagement de 100 000 euros. Le Ministère de la santé autorise à exploiter l’eau du forage comme une eau minérale. Et puis, le 10 février 2005, le préfet précise au maire que l’autorisation de Ministère de la santé « ne permettait pas de mettre en place une cure thermale conventionnée, prescrite et suivie par une durée de soins de 18 jours ».
En septembre 2005, la Ville signe un premier protocole d’accord avec AVA & P2i pour une promesse de vente d’un ensemble foncier en vue de la construction d’un établissement thermal, centre de remise en forme, résidences hôtelières et appartements (cession du centre départemental des pompiers, de la caserne Voyer et du champ de foire pour l’euro symbolique). Le préfet conteste le 17 novembre 2005, demandant que le prix se fasse d’après l’évaluation des Domaines, à savoir 1 216 000 euros. La Ville signe un nouveau protocole sur le prix de 1 216 000 euros avec AVA & P2i « au capital de 100 euros », commente le maire, les conditions suspensives devant être levées au plus tard le 31 décembre 2006 : AVA & P2i devra trouver l’investisseur-aménageur et le gestionnaire de ces ensembles, le permis de construire devra être obtenu, ainsi que le plan de financement et d’exploitation sur neuf ans et une lettre d’intention d’un partenaire financier qui confère toute assurance à la commune.
La promesse de vente voit arriver la fin 2006 sans que la situation ait évolué…
Le 19 décembre 2006, le conseil municipal reconduit le protocole d’un an, le prorogeant jusqu’au 31 décembre 2007. Le 26 mai 2007, le projet est présenté à l’Abbaye Royale. Jean-Pierre Yves, représentant AVA & P2i annonce les noms des opérateurs-investisseurs. Pour le thermalisme hôtelier (« malgré l’appellation, il s’agit de thermalisme classique avec prescription médicale sur trois semaines », dira le maire Jean Combes), il s’agit de la société "SAS GT Vacances" . Pour la partie immobilière, le promoteur sera la société "Villes et Territoires", filiale de la société "SA Céléos" (voir L’HEBDO 508 du 4 juillet 2007).
Le 28 juin 2007, le maire est autorisé à signer les actes de transfert de propriété à AVA & P2i au prix convenu.
Enfin, au conseil municipal du 8 novembre 2007, évoquant pour la première fois l’ère du "thermo-ludisme", les élus reçoivent Jean Garsau, directeur du Centre Europa de loisirs et d’affaires (Cela), Michel Saes, directeur commercial et marketing de la société Cela (un ancien de Thalacap) et Mathieu Puig, architecte, ainsi que Jean-Yves Pierre, représentant l’aménageur AVA & P2i (bureau d’études chargé de trouver les investisseurs). Le groupe Céléos (partie immobilière) n’est pas représenté.
Puis, le 13 décembre 2007, le conseil municipal adopte de proroger l’accord de deux ans supplémentaires jusqu’au 31 décembre 2009, malgré la demande de l’opposition de l’époque de ne proroger que jusqu’au 31 juillet 2008.
Aujourd’hui
« Nous sommes pieds et poings liés. La commune est liée par cet engagement jusqu’au 31 décembre 2009 », déclare Paul-Henri Denieuil, évoquant par là les dommages et intérêt dus en cas de rupture du contrat. AVA & P2i est toujours en recherche d’investisseurs crédibles pour se retirer à leur profit. Les clauses suspensives restent actives. « Pour l’instant, aucune de ces conditions suspensives n’est réalisée », poursuit le maire, qui n’a « aucun contact avec les investisseurs potentiels. J’ai reçu à deux reprises AVA & P2I et une nouvelle réunion est prévue le 20 octobre. Nous avons demandé le dépôt d’un nouveau permis de construire, la présentation des plans de financement et la lettre d’intention d’une société financière solide. Pour l’instant, je ne vois rien venir. Le groupe Céléos a été mis en redressement judiciaire en août. Quant au groupe Cela, il n’a toujours pas souhaité rencontrer le maire de Saint-Jean d’Angély ! ».
Et de mettre en cause Françoise Mesnard, élue de l’opposition, par une déclaration qu’elle avait faite au conseil municipal du 28 juin 2007, disant son enthousiasme et sa confiance dans un projet qualifié de « pari gonflé et de nouvelle aventure » et dans des investisseurs « considérés comme des groupes financiers sérieux », Cela et Céléos.
Vifs échanges
Dans sa réponse, Françoise Mesnard, assumant les propos de l’époque, réplique : « Vous parlez beaucoup de Céléos. Vous avez mené la campagne en diffamant le groupe Cela. Vous avez voulu démolir ce projet. Je continue à dire que le centre thermo-ludique était une opportunité. La vente de la caserne pour 1 200 000 euros permettait à la commune de rentrer dans ses fonds ». Bernard Prabonnaud, également dans l’opposition municipale, conforte la réplique : « L’enjeu est important pour la Ville. Jean Garsau et son groupe Cela avait un projet bien réel ».
« Il faut que vous redescendiez sur terre !, rétorque Paul-Henri Denieuil. Je suis engagé par mon prédécesseur jusqu’au 31 décembre 2009. Je ne ferai rien pour faire capoter ce projet, car AVA & P2i – au capital de 100 euros – n’attend qu’une chose : demander des dommages-intérêts à la commune en cas d’annulation du projet. L’heure du bilan n’est pas venue. On jugera "l’aventure" à ce moment-là ! »
Les thermes promettent encore bien des débats à Saint-Jean d’Angély.
Les thermes en euros
La commune a engagé 1 650 000 euros (sur un coût total d’environ 2 500 000 euros). Ces dépenses concernent l’acquisition de la caserne, le coût du forage, le module thermal expérimental, les frais d’études, les frais d’avocat. Il reste 971 000 euros à financer par emprunt de 15 ou 20 ans. Toutefois, la TVA à 19,6 %, soit 200 000 euros, est à payer maintenant.
CONSEIL MUNICIPAL (suite)
Les finances de la Ville
Le conseil municipal du 2 octobre a fait une présentation de l’audit réalisé sur la situation financière de la ville de Saint-Jean d’Angély.
» Bernard MAINGOT.
Non annoncée dans l’ordre du jour, une communication a été faite par Gilles Raillard, adjoint au maire, sur les premiers résultats d’un audit réalisé par KPGM, afin de juger de la situation financière de la Ville et de la marge de manœuvre de la nouvelle municipalité.
Concernant la démographie, la ville a perdu en population, le nombre d’habitants passant de 8 739 en 1966 à 7 491 en 2006, avec un vieillissement dans la pyramide des âges. Ce groupe territorial en baisse créé un risque de voir baisser la Dotation Globale de Fonctionnement de l’Etat (DGF), basée sur le nombre d’habitants.
Dans la synthèse du budget de la ville, on apprend que la fiscalité est plus lourde que la moyenne des villes de même importance sur le foncier bâti (41 % des recettes de fonctionnement qui s’élèvent à 9,163 millions d’euros) et la taxe professionnelle (40 % des recettes). Une taxe professionnelle qui reste très concentrée sur trois entreprises (Mapa 8 %, Joubert 13 % et Gringoire 20 %). La dette, jugée élevée, est cependant maîtrisée et ramenée en deçà de dix ans.
D’autres remarques
Dans les dépenses de fonctionnement (7,9millions d’euros en 2007), l’audit fait ressortir que les charges de personnel (18 %) sont plus élevées que la moyenne, les subventions sont en très forte augmentation au cours des deux dernières années et que des dépenses diverses sont non contrôlées et non maîtrisées.
En ce qui concerne le pilotage financier, il n’y a pas d’approche prospective sur plusieurs années (plan pluriannuel d’investissement), pas d’outil de suivi analytique par politique. Les démarches et outils de pilotage sont très limités (contrôle de gestion, tableaux de bord…). La mise en œuvre du contrôle interne dans la préparation et l’exécution budgétaire relève de la tradition orale et la procédure budgétaire n’est pas formalisée. Il n’y a pas de fonction juridique dans les services. Par ailleurs, les conclusions de la Chambre régionale des comptes en 2005 n’ont pas fait l’objet de suivi (conventions avec les associations ayant reçu plus de 23 000 euros de subventions, indisponibilité des comptes de ces associations). Le patrimoine n’a pas fait l’objet d’un inventaire chiffré.
Des améliorations à apporter
Gilles Raillard à indiqué vouloir « rationaliser les structures et l’organigramme des services, tout en externalisant des services ». Côté dépenses de fonctionnement, le "saupoudrage" systématique des subventions laissera la place à quelques partenaires, « les priorités de l’action sociale seront précisées, le déséquilibre des budgets annexes financés par le budget de la ville sera à résoudre ». Les clubs, associations et partenaires seront sensibilisés et responsabilisés sur les biens mis à disposition par des conventions à respecter. Enfin les dépenses seront analysées pour une meilleure action (exemple 42 000 euros de chauffage à l’Abbaye royale…).
Incivilités et délinquance
« Devant l’augmentation des incivilités, du vandalisme, des vols, des procédures de racket liés à une consommation de drogue et d’alcool », le maire désire remettre en action le Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). Celui-ci existe depuis 1998 mais ne se réunit plus depuis 2004 et n’est donc plus opérationnel ou efficace. Paul-Henri Denieuil explique : « On s’aperçoit que la police municipale est en quantité insuffisante. Nos habitants se sont appauvris. La concentration de logements sociaux ou insalubres est favorable au développement de ces incivilités. Le 1er point est qu’il faut éviter de cacher la situation. Un nombre important d’enfants mineurs consomme de la drogue. Nous allons nous associer à l’initiative de prévention du Rotary sur les dangers de la consommation d’alcool par les jeunes ».
En deuxième lieu, le maire désire rétablir une sorte de discipline civile : « Nous ne pouvons tolérer ces actes gratuits de vandalisme ou de racket. Il faut déposer systématiquement plainte – je porterai systématiquement plainte - pour pouvoir les réprimer et ne pas avoir peur des représailles. La 3e action est de favoriser la concertation entre tous ceux qui sont concernés pour apporter une contribution contre les risques de la délinquance ».
Le conseil en bref
L’opposition s’abstient sur la création d’un poste de collaborateur de cabinet à temps complet au motif de l’importance du salaire (2 650 euros).
Aires de stationnement : la redevance pour non-réalisation d’aires de stationnement dans le cadre des permis de construire étant proposée à 1000 euros, l’opposition votre contre
Rue du Palais : l’élargissement de cette rue permettra un meilleur accès vers le champ de foire. Jacques Castagnet explique la procédure d’une déclaration d’utilité publique (DUP) permettant d’accélérer les acquisitions foncières. Jean Moutarde élu de l’opposition, dénonce le fait que cette procédure permettra l’expulsion des familles concernées. L’opposition vote contre cette délibération.
Parking : La société Résid West désire vendre à la commune un terrain de 2 523 m2 situé au 54 – 58 boulevard Lair (en face l’ancien cinéma Eden) au prix de 190 000 euros (estimation des services fiscaux :170 000 euros avec une marge de négociation de 10 %). Jacques Castagnet a expliqué l’opportunité représentée par ce terrain pour y construire un parking tout près du centre-ville, compte tenu des projets d’aménagements urbains de la commune. Adoption à l’unanimité.